Dans ma pratique de la danse, j'ai toujours été fasciné par cette idée du corps comme territoire à explorer. Non pas simplement comme un instrument à maîtriser, mais comme un espace vivant, changeant, plein de mystères.

Chaque mouvement est une découverte. Chaque geste révèle quelque chose de notre histoire personnelle, de nos tensions accumulées, de nos joies enfouies. La danse devient alors un dialogue avec soi-même, une conversation intime entre le conscient et l'inconscient.

Dans nos ateliers avec l'Association Mosae, nous créons des espaces où cette exploration peut avoir lieu en toute sécurité. Des espaces où l'on peut se permettre d'être maladroit, hésitant, vulnérable. Car c'est souvent dans ces moments de vulnérabilité que naissent les plus belles découvertes.

Le mouvement ne ment pas. Il révèle ce que les mots ne peuvent parfois pas exprimer. C'est cette vérité du corps en mouvement qui me fascine et qui guide mon travail de chorégraphe et de pédagogue.

La semaine dernière, j'ai animé un atelier de danse avec un groupe d'adolescents dans le cadre de notre projet "Initiative Jeunesse". Comme souvent avec ce public, je suis arrivé avec mes doutes : vont-ils adhérer ? Trouveront-ils ça ridicule ?

La première demi-heure a été difficile. Les rires nerveux, les regards gênés, les corps figés dans l'auto-conscience typique de l'adolescence. Mais j'ai appris à ne pas me décourager. À laisser le temps au temps.

Puis, petit à petit, quelque chose s'est passé. Un garçon timide a osé un mouvement qui a fait rire tout le groupe – mais d'un rire bienveillant cette fois. Une fille s'est mise à improviser sur la musique, avec une liberté magnifique. Les autres ont suivi.

À la fin de la séance, ils ne voulaient plus partir. Ils me demandaient quand serait le prochain atelier. Ce moment magique où un groupe d'individus devient une communauté créative, c'est précisément ce qui me passionne dans la médiation artistique.

La danse a ce pouvoir incroyable de créer du lien, de briser les barrières, de révéler la beauté de chacun. Et travailler avec les jeunes me rappelle constamment pourquoi j'ai choisi ce métier.

On me demande souvent ce qui différencie un mouvement technique d'un mouvement poétique. La question est complexe, car la technique et la poésie ne s'opposent pas – elles se nourrissent mutuellement.

Un mouvement devient poétique, je crois, quand il dépasse sa fonction première. Quand lever un bras ne consiste plus simplement à lever un bras, mais devient un geste chargé d'intention, de présence, de sens.

C'est cette dimension poétique que nous cherchons à cultiver dans nos projets "Contact avec le vivant". Lorsque nous dansons en forêt, au bord d'une rivière, ou dans un jardin, nous invitons les participants à se connecter à quelque chose de plus grand qu'eux-mêmes. Le mouvement devient alors un dialogue avec le paysage, avec les éléments, avec la vie elle-même.

La poésie du mouvement naît de cette présence totale, de cette qualité d'attention particulière que nous portons à chaque instant. Elle émerge quand nous cessons de "faire" pour simplement "être".

C'est un équilibre délicat à trouver, entre la maîtrise technique nécessaire et l'abandon qui permet à la magie d'opérer. Mais c'est précisément cette recherche qui rend la danse si passionnante, si vivante, si humaine.